755 km en voiture électrique. Bonjour l’angoisse !
Oublions un moment l’Ukraine et les élections et partons skier dans les Hautes-Alpes.
Le Figaro nous invite au voyage
Trajet Paris-Barcelonnette
755 km dont 579 d’autoroute et 179 de montagne
Véhicule : un SUV 4×4 de plus de deux tonnes
2 moteurs électriques, un par essieu, fournissant 265 CV. Une belle bête.
Batterie de 77 kWh
Autonomie théorique : 495 km
Attention : un tel voyage se prépare
Vous n’êtes plus dans votre bonne voiture essence ou diesel, qui pourra être ravitaillée avec une station tous les 30 km sur autoroute.
Restez sur les grands axes car le maillage des bornes électriques n’est pas encore bien dense.
Sinon, c’est le remorquage assuré avec batterie à zéro !
Ayez le pied léger. Si vous aimez être collé au siège au démarrage, avec 265 CV c’est possible, mais pas longtemps. L’autonomie sera divisée par deux.
Avez-vous remarqué le nombre de voitures électriques qui roulent à 80 km/h sur autoroute ? Elles sont en mode éco pour atteindre la prochaine borne indiquée par l’ordinateur, qui vous incite à rouler doux.
À 130 km/h vous n’irez pas bien loin. Vitesse préconisée 110. Gens pressés s’abstenir. La voiture électrique aime la ville. Évidemment un gros 4X4 qui roule à 110 et se fait doubler par les Twingo, c’est vite frustrant.
S’il fait froid, le chauffage consomme beaucoup et sachez que la batterie doit être réchauffée en permanence, ce qui plombe l’autonomie.
Il paraît que les autres servitudes consomment peu, phares, essuie-glaces etc. À vérifier.
Sachez aussi que les bornes ne sont pas standardisées, que des adaptateurs doivent suivre dans le coffre et que beaucoup d’opérateurs prévoient des abonnements. La joie.
Quant au coût aux 100 km, il est équivalent à celui d’un moteur thermique. Du moins avant la guerre en Ukraine et la flambée du pétrole.
Toutes ces contraintes étant parfaitement intégrées, c’est parti, batterie chargée à bloc.
L’ordinateur de bord va vous aider, vous guider et calculer en permanence l’autonomie restante.
Porte de Saint-Cloud, l’ordi annonce 326 km d’autonomie. Pas de quoi s’extasier. On est loin des 495 km annoncés.
Le GPS a prévu pour vous 3 arrêts sur le parcours. Ça c’est le côté fun, il bosse pour vous.
Pause 1 Autonomie restante 59 km et 18 % de charge batterie
Il faut quitter l’autoroute pour ravitailler. Sympa ! Borne en plein air sous la pluie.
Il faut 35 minutes pour récupérer 80 % de la charge. Mais au bout de 7 minutes, elle s’arrête. Il faut recommencer l’opération. Finalement, 47 kWh sont récupérés en 36 minutes.
Pause 2 Autonomie restante 61 km
42 kWh sont récupérés en 30 minutes
Il reste 383 km jusqu’à la destination
Pause 3
56 kWh récupérés en 45 minutes
Pause 4
La première borne ne reconnaît pas les différentes cartes d’abonnement. On enrage
La seconde est HS. De mieux en mieux !
Les autres sont occupées. 10 minutes d’attente pour qu’une borne se libère
20 kWh sont récupérés en 40 minutes
Arrivée à destination avec 61 km d’autonomie.
Bilan
Consommation moyenne 22,7 kWh/100 km
Il faut donc s’arrêter environ tous les 200 km pour ne pas prendre de risque.
Le temps de recharge est rédhibitoire pour beaucoup d’utilisateurs
Le nombre et la fiabilité des bornes sont insuffisants
Bref, même à bord d’une voiture de luxe c’est le stress assuré.
Personnellement, je réserve cette fantaisie écolo à la ville, quand on peut recharger à domicile.
Se traîner comme un escargot pour ne pas plomber l’autonomie, stresser en gardant l’œil rivé sur le calculateur, risquer de tomber sur des bornes HS ou déjà occupées, poireauter 2 h 30 pour recharger la batterie sur un trajet de 755 km, être tributaire d’abonnements différents pour utiliser les bornes, tout cela ressemble, en ce qui me concerne, à un parcours du combattant. Ça n’a rien d’un progrès, c’est un supplice.
Je garde mon véhicule thermique avec ses 1 200 km d’autonomie aux vitesses réglementaires.
2 h 30 de temps perdu à recharger pour un trajet de 755 km c’est une contrainte plus que décourageante.
La voiture électrique ce n’est pas fait pour l’autoroute, ce n’est pas fait pour les trajets longs. C’est fait uniquement pour la ville.
Avec une électrique, c’est l’incertitude permanente sur l’heure d’arrivée. C’est la hantise du remorquage et on ne compte plus les gags rencontrés par certains propriétaires partis à l’aventure, sans bien connaître les contraintes du parcours.
Cela dit, si vous avez le goût de l’imprévu, l’électrique est fait pour vous.
Jacques Guillemain